samedi 31 octobre 2015

À Saillans, les habitants réinventent la démocratie

À Saillans, les habitants réinventent la démocratie

17 octobre 2015 / Gaspard d’Allens et Lucile Leclair (Reporterre)



Dans ce village suspendu aux pentes du Vercors, l’histoire commence comme une fable. Un projet de supermarché menaçait le « bien vivre au pays ». Le maire était pour, les habitants contre. Des citoyens se sont présentés aux élections municipales. Leur liste a gagné et, depuis, la révolution participative est en marche.
- Saillans (Drôme), reportage
L’eau vive descend droit des montagnes. Assise au bord de la Drôme, Mireille se souvient de la rude bataille face au mépris des édiles. « Le maire nous disait : “C’est moi qui ait été élu, c’est moi qui décide.” On lui a prouvé le contraire », sourit-elle. Dans son dos, le massif des Trois-Becs culmine à 1.500 mètres, encerclé par la brume. Mireille a été parmi les premiers à se mobiliser contre le supermarché, en 2010.
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Les Trois-Becs.
« On voulait garder le cœur du village vivant », raconte-t-elle. À Saillans – 1.240 habitants – on compte, entre les ruelles étroites, deux boulangeries, une charcuterie, un magasin bio, deux bars et une épicerie. « Nous avons organisé une veille citoyenne et des manifestations pour bloquer la départementale. » Une pétition a recueilli plus de 800 signatures. Devant la fronde, les enseignes Casino-Intermarché préfèrent abandonner le projet, au grand dam du maire. L’énergie qui se dégage de la lutte donne des ailes. Les habitants se prennent à rêver d’une autre politique, « le règne des mâles blancs dominants, ça suffit ! » disent-ils.
Des réunions publiques sont organisées à l’approche des municipales de 2014. Avec un succès immédiat et une formule détonante : « Pas de programme, pas de candidats, la liste c’est vous ! » Plus d’une centaine de personnes se séparent en sept groupes et bûchent sur l’avenir du village. « Au début, on ne connaissait rien à la démocratie participative. Nous ne sommes pas partis de la théorie mais de considérations pratico-pratiques », raconte Sabine, géographe de 36 ans.
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La mairie de Saillans.
Trois idées fortes rassemblent le groupe d’habitants, poursuit Sabine : la transparence, « l’accès de tous à l’information », la collégialité au sein de l’équipe municipale « pour éviter que le maire et le premier adjoint s’accaparent le pouvoir » et la participation des citoyens à la gestion de la commune. « Le régime représentatif confisque la démocratie. La citoyenneté ne se résume pas à un vote tous les six ans. »

Un vent nouveau souffle sur la ville

Trois semaines avant les élections, le groupe nomme une tête de liste. « On a essayé de tenir jusqu’au bout pour ne pas avoir une personne désignée ». À la réunion ce jour là, Vincent est absent, il travaille comme veilleur de nuit. On le prévient par mél qu’il a été choisi. La liste souhaite désacraliser la fonction d’élu. Vincent le dit en toute simplicité : « Je n’ai pas le costume et je ne souhaite pas me travestir. » Il ne parle pas en acronymes ni ne gonfle le torse lorsqu’il fait son tour de marché.
Le soir de l’élection, le 23 mars 2014, la victoire est écrasante. 57 % des électeurs votent pour la liste « Autrement pour Saillans... tous ensemble » avec un taux de participation record de 80 %.. François Pégon, le maire sortant, également conseiller général, ravale sa cravate.
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Vincent dans la salle du conseil municipal. « Aujourd’hui je suis assis sur le trône mais, un jour peut-être, on le brûlera sur la place publique. »
Depuis, un vent nouveau souffle sur Saillans. La mairie est comme une ruche. Christian, un habitant, la soixantaine passée, témoigne : « Je vais à la marie comme je vais chez moi, je ne dis pas “monsieur le maire”, la porte est ouverte. » La mairie a été rebaptisée la « maison commune ». Les agents techniques – une dizaine de personnes - en ont le tournis : « Dans des villages de cette taille, normalement, on voit les conseillers municipaux deux fois par an. Ici, on les croise tous les jours ! »
Originaire de Lyon, Fernand s’était déjà présenté à des élections municipales. « Une campagne sans saveur », se souvient-il, où « l’on se contentait de suivre le maire. » À Saillans, son expérience est toute différente : « Les gens n’ont pas voté pour des personnes mais pour des contenus. Ils ont validé une méthode de gouvernance. » L’équipe ne veut pas seulement solliciter les habitants, elle souhaite « cogérer avec eux la commune », explique Fernand.
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Source : Mairie de Saillans.
Deux jeudis par mois, l’équipe municipale organise « un comité de pilotage public » : une réunion de travail ouverte aux habitants avec l’ensemble des élus. « Avant, tout était fait de manière clandestine, avec des simulacres de débats lors du conseil municipal », affirme Fernand. Aujourd’hui, des « groupes action-projet » sont créés avec les citoyens qui désirent s’impliquer sur un thème précis : l’entraide sociale, le composteur collectif, les économies d’énergie, la circulation… On dénombre plus de 250 participants, soit un quart de la population adulte.
Les quatorze élus fonctionnent en binôme et se partagent les responsabilités. Les indemnités de fonction sont réparties entre tous – 150 euros pour les conseillers municipaux, 1.000 euros pour le maire. « Cela reste symbolique, la politique n’est pas une profession », alerte Isabelle, en charge de la jeunesse.

La nouvelle municipalité renverse le langage de l’oligarchie. « Notre démarche repose sur l’expertise d’usage des habitants. Chacun est expert de sa rue, de son village. », dit Isabelle. Selon un membre de la liste, « plus que le diplôme, la compétence s’acquiert par le vécu ».
Impliqués dans la vie de la cité, les Saillansons se responsabilisent. Comme par un effet de miroir, les élus admettent que les décisions ne leur appartiennent plus. « La vision acéphale - sans chef - nourrit l’intelligence collective », déclare Fernand, enthousiaste. Les prises de décisions sont plus longues mais plus abouties. « L’extinction de l’éclairage public la nuit vient d’être mis en place, les habitants ont conçu une matrice avec des horaires différents selon les saisons, les jours et les quartiers. Le prestataire n’avait jamais vu ça ! » poursuit-il.
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La Drôme est l’une des dernières rivières sauvages d’Europe, sans barrage ni lac artificiel.
Dans les débats, les préoccupations environnementales sont omniprésentes. De la préservation de la rivière aux sentiers découverte, de la rénovation énergétique à la limitation des déchets, les habitants se mobilisent. Emmanuel, réalisateur de profession et animateur de la commission énergie, s’interroge : « Si on implique les citoyens, n’est-ce-pas le meilleur moyen de penser le long terme, et donc de s’emparer de la question écologique, au-delà des cycles électoraux ? »

« Mais où sont passés mes amis d’enfance ? »

Dix-huit mois après les élections, la nouvelle méthode commence à entrer dans les mœurs. « On a posé des outils, les gens se les réapproprient », assure Fernand, interpellé récemment dans la rue car un compte-rendu n’avait pas été affiché. « Les habitants deviennent plus exigeants, une culture de la participation est en train de germer », constate-t-il.
La démocratie participative reste cependant un sport de combat : les élus perdent leur souffle un an et demi passé en apnée. Ils croulent sous les méls, enchaînent les réunions et s’épuisent.
La liste regrette aussi de ne pas mobiliser plus de monde. Le profil des habitants engagés est plutôt âgé, les jeunes ne sont pas tellement impliqués. « Nous devons trouver de nouveaux dispositifs pour les inclure, des référendums locaux ou des agoras citoyennes… » Pour vivre, la démocratie participative doit constamment se renouveler, « être une invention permanente ».

Dans la rue centrale, le bar des Sports se transforme souvent en café du commerce. La digue se rompt après le pastis, des voix s’élèvent contre « la bande » qui a pris la mairie. « Ils ne bossent pas », avance un homme accoudé au comptoir. « À cause d’eux, il y a plein de chevelus qui débarquent, des marginaux ! » renchérit son voisin. Corinne, une fidèle de la liste, originaire de Saillans, s’inquiète sur le pas de sa porte : « Mais que font mes amis d’enfance ? Je connais les gens d’ici, je vois l’indifférence, je sens le silence sur les visages, ils ne sont pas présents aux débats. »
La retraitée a vu le village se transformer au cours des cinquante dernières années, la désertification d’abord puis l’arrivée des « néo » ensuite, qui ont réinvesti le centre-bourg délaissé. En vingt ans, la population a augmenté de 30 %, le taux de croissance le plus fort de la Drôme. « Avec cette liste, où l’on compte la moitié de néo, il y a eu comme un changement de pouvoir, mal accepté par les vieilles familles », raconte Corinne, impuissante.
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Il existe une quarantaine d’associations à Saillans dont « l’Oignon », un bar autogéré où les adhérents produisent eux-mêmes leur vin.
Pierre-Jean regarde passer le temps sur son balcon à l’entrée de la commune. « La mère Michu du village, c’est moi », dit-il, le sourire goguenard, en saluant des têtes connues. « Les médias se précipitent à Saillans mais il n’y a rien d’extraordinaire, on palabre sur des bouches d’égouts, une déchetterie, l’emplacement de la salle des fêtes. » Un de ses amis commente : « Est-ce utile de faire de la démocratie participative sur des sujets aussi anecdotiques ? Pour être consulté sur des pots de fleurs ? Une ville de cette taille n’a pas de marge de manœuvre. »
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Pierre-Jean.
Quand on prononce le mot « intercommunalité », Vincent, le maire, fait la grimace. « À l’interco, on a été ostracisés », dit-il. La ville de Crest et son sulfureux maire, Hervé Mariton (LR), font tout pour les marginaliser.
Alors que Saillans est le troisième bourg de la vallée, il n’obtient aucune vice-présidence au sein de l’intercommunalité. Vincent est tout juste nommé au bureau avec 14 votes blancs. Comme si, dans ce cercle de notables locaux, il manquait de légitimité.
La situation est problématique. Selon Isabelle, « la mairie n’a presque aucun pouvoir autonome sur son territoire. On manque de place pour une crèche, pas de local pour les jeunes, le tout est décidé à l’interco ». Avec un budget annuel de 1,2 million d’euros, la capacité d’autofinancement du village est limitée.

« Saillans agit comme un catalyseur »

Peu à peu, l’équipe apprend les jeux d’influence et les rapports de force. Vincent et l’équipe municipale devront reprendre leurs bâtons de pèlerin, « quitte à serrer des paluches au congrès des maires ». « On ne peut pas faire la démocratie participative isolément dans un seul village. », dit Vincent.
Saillans cherche à essaimer. Être « une expérience reproductible, malléable, adaptable ». Selon Tristan, le directeur du centre social de Die, « les outils sont simples et transmissibles ». Pour engager la démocratie participative, « on a simplement besoin d’un tableau, de feutres, de gommettes ». Et de volonté politique.
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Cet été, Tristan a sillonné la France à la rencontre des collectifs citoyens pour répandre « une bonne nouvelle et non pas la bonne parole ».
Dans les environs, le village a déjà fait des émules, Grâne lance son plan local d’urbanisme (PLU) participatif, le maire de Luc-en-Diois est venu se former pour animer des réunions, une assemblée populaire vient de se créer à Die. Le festival Curieuses démocraties, fin septembre, a tenté de fédérer ces différentes initiatives. Pour tous, « Saillans agit comme un catalyseur, elle légitime la démarche citoyenne », note Tristan.
Si Saillans captive les projecteurs, les habitants tentent de banaliser leurs pratiques. Ils se lassent d’être transformé en « zoo démocratique ». Jean, le vigneron, s’agace : « Notre village est folklorisé. On se retrouve comme une bête de foire. Les médias ont la manie de tout transformer en spectacle. Ils font l’impasse sur ce qui est difficile. Il faut parler du fonctionnement juridique, du fonctionnement technique pour que les gens s’approprient la démarche et se demandent : “Qu’est-ce que je peux faire chez moi ?” »

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L’usine grecque qui résiste sans patron et avec des savons écolos

L’usine grecque qui résiste sans patron et avec des savons écolos

19 septembre 2015 / Emmanuel Daniel (Reporterre)



L’histoire de Vio Me est un rayon de soleil dans l’hiver sans fin que traverse la Grèce, alors qu’elle élit dimanche 20 septembre sa nouvelle Assemblée législative. Le patron a fermé cette usine de matériaux pour le BTP, mais les ouvriers ont décidé de l’occuper et de relancer une production écolo de manière autogérée grâce à un formidable soutien populaire.
Au nord de Thessalonique, une zone commerciale immense gagne progressivement du terrain sur ce qui était il y a peu une zone industrielle. Au milieu de cet océan consumériste, cachée derrière une allée de grands arbres, une usine poussiéreuse vient rappeler qu’il y a peu, on croisait ici des ouvriers en bleu de travail en lieu et place des clients poussant leur caddie. L’endroit semble désaffecté. Toutes les entrées paraissent condamnées et une seule voiture est garée sur le vaste parking.
Pourtant, dans un des bâtiments, derrière un mur de vieille tôle, des bruits sourds viennent parfois briser le silence. 

Pour pénétrer dans l’usine, il faut s’annoncer. Le lieu est gardé 24 heures sur 24 par des ouvriers et des soutiens locaux. Et pour cause, les travailleurs de Vio Me, occupent illégalement les lieux depuis 2011, année où les propriétaires ont décidé de cesser brutalement l’activité.
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Vue depuis le toit de l’usine. Dèrrière les grands arbres commence l’immense zone commerciale.

Désobéissance à la loi du marché

L’histoire aurait pu se terminer comme beaucoup d’autres en Grèce ces dernières années. Une entreprise bénéficiaire (ici Filgeram-Johnson, maison mère de Vio Me) décide de fermer ses portes et de ne pas payer les arriérés de salaire qu’elle doit à la cinquantaine d’ouvriers d’alors.
Sauf qu’eux ont décidé de désobéir à la loi du marché. Pendant un an, une trentaine d’ouvriers syndiqués de l’usine l’occupent pour empêcher les propriétaires de récupérer les machines. La première année, ils peuvent compter sur leur maigre indemnité chômage pour survivre. Puis, au fur et à mesure de la médiatisation de leur combat, les soutiens, locaux d’abord, puis internationaux, abondent, permettant de prendre en charge les besoins en argent et nourriture de ces travailleurs en lutte. Au terme de nombreuses assemblées générales, les ouvriers et leurs soutiens décident de relancer la production. Mais plutôt que de fabriquer de la colle pour carrelage, l’ancienne spécialité de l’usine, ils décident de produire du savon et différents produits ménagers naturels. Ce virage écologique n’avait rien d’évident, surtout en Grèce où cette sensibilité n’est pas des plus développées.
C’est par nécessité et pragmatisme que les ouvriers de Vio Me sont devenus écolos. « On savait qu’on ne pouvait pas faire la même chose qu’avant car on avait peu d’argent alors que les machines sont chères et la matière première importée. On a alors cherché une matière première peu chère et locale, or on a beaucoup d’huile ici !  », m’explique Tinna, arrivée au moment de la reprise de la production. Ce sont également les soutiens locaux qui les ont convaincus de se lancer dans des produits écologiques, plus susceptibles d’êtres vendus dans les réseaux militants.

Nul besoin de patron


Un autre changement d’ampleur est intervenu depuis la réouverture. Leur usine, ils ont décidé de la gérer sans chef. Quand je demande à Dimitris, un des piliers de la lutte qui gigote sur sa chaise en attendant qu’on lui traduise les questions, pourquoi ils ont décidé de s’organiser ainsi, il me répond sur le ton de l’évidence : « Le patron est parti, pourquoi chercher à en avoir un autre ? Je l’ai vu deux fois en deux ans. On n’avait pas besoin de lui pour se servir des machines qu’on utilise tous les jours. » Mais il reconnaît que passer d’une organisation hiérarchisée où les tâches sont divisées à l’extrême à l’autogestion « ne fut pas facile. D’ailleurs, ça ne l’est toujours pas aujourd’hui. Mais on a appris à mieux se connaître. Le ‘je’ est devenu ‘nous’. Il n’y a pas l’administration d’un côté et nous [les ouvriers] de l’autre comme avant, seulement nous avec le même niveau de pouvoir. »
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Dimitris nous montre les produits de l’usine
Tinna est assise à ses côtés sur une des chaises en plastique qu’ils ont installées en rond pour recevoir les visiteurs du jour : des journalistes japonais, des documentaristes espagnols et grecs, des voyageurs français et moi. Elle détaille l’organisation de Vio Me : « On se rencontre deux fois par semaine en assemblée en plus des discussions informelles pendant le travail. » Tout le monde peut être amené à tout faire même si certaines tâches qui demandent des compétences spécialisées sont assurées par une personne. « Vu que je parle anglais, c’est moi qui m’occupe des relations avec les journalistes et les soutiens internationaux », explique-t-elle.
Ce jour-ci, il y a autant de visiteurs que de travailleurs et l’usine, aussi vide qu’un bureau de vote un jour d’élections européennes, donne l’impression de tourner au ralenti. Les membres de la coopérative aimeraient voir leur lieu de travail aussi foisonnant que par le passé. « On pourrait être cinquante à travailler ici. On devrait être cinquante d’ailleurs. Tout le monde aimerait qu’on grandisse et qu’on utilise toutes les possibilités de l’usine », avance Dimitris.
Mais plusieurs éléments rendent difficile cette montée en puissance. D’abord, la situation économique en Grèce ainsi que leur faible trésorerie qui les pousse à réinvestir leurs maigres recettes dans l’achat de matières premières plutôt que pour l’acquisition de nouvelles machines. Mais cette limitation est aussi due à leur mode de distribution. Les produits écolos de Vio Me sont principalement écoulés dans leur réseau de solidarité dans des squats, des centres sociaux et via divers collectifs qui commandent des cartons de produits et se chargent ensuite de les écouler. Le reste est vendu lors de festivals et du marché de producteurs organisé tous le mois sur le site. « On ne pourra grandir que si on trouve plus de contacts à l’étranger. La prochaine étape est donc d’impliquer plus de gens », dit Tinna.
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Savons fraîchement coulés dans leur moule en train de sécher

La fragile flamme de l’utopie autogestionnaire grecque

Vio Me, cette lutte de travailleurs s’appuyant sur un soutien populaire conséquent, est souvent portée en étendard du mouvement des structures autogérées en Grèce qui s’est développé, si l’on peut dire, à la faveur de la guerre économique qui a plongé le pays dans la tourmente. Pourtant, sur le plan économique, cette expérience est fragile. « Les salaires permettent à peine de survivre », fait savoir Tinna. D’autant plus qu’ils ont travaillé d’arrache-pied pour réorganiser la production, et s’approprier les nouveaux savoir-faire, tout en menant un travail politique intense. « On travaille bien plus de huit heures par jour. Vio Me implique une large partie de notre vie. On aimerait bosser moins mais on doit penser à notre survie », raconte-t-elle, visiblement éprouvée. A plusieurs reprises pendant l’entretien, elle fait montre d’un certain agacement et répond aux questions avec des phrases courtes entrecoupées de soupirs.
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Cour intérieure de l’usine
La jeune femme explique que nous ne sommes pas tombés au meilleur des moments. « Excusez-moi si je suis un peu stressée, la situation est tendue ces jours-ci. » Ils font face aux pressions de plus en plus insistantes des propriétaires de l’usine qui multiplient les procédures judiciaires. « On en a une par mois en ce moment », assure Tinna. Selon elle, ces derniers rêvent de récupérer leur bien, non pas pour relancer la production mais pour tout détruire et vendre le terrain à des promoteurs immobiliers afin d’agrandir encore la zone commerciale.
Un risque rendu plausible par deux décisions de justice défavorables à Vio Me. Concrètement, ils sont expulsables à tout moment. Certains soutiens du mouvement font pression sur le gouvernement pour permettre à cette expérience autogestionnaire de se développer dans de bonnes conditions. Tinna elle déclare ne pas s’intéresser à ce qui se passe dans la tête des puissants. « On ne sait pas ce qu’ils veulent faire. Ce qu’on sait, c’est que la police devra venir nous déloger. On va résister et réagir », lance la jeune femme, faisant écho au slogan de Vio Me : « Occuper, Résister, Produire. »
Le collectif de soutien à Vio Me milite aussi pour une régularisation de leur statut d’entreprise autogérée, chose promise par Tsipras lors d’une visite de l’usine pendant sa campagne électorale.
Je demande à mes interlocuteurs aux visages aussi fatigués que les murs de l’usine si malgré les difficultés, le jeu en vaut la chandelle. « Même si je ne le croyais pas, on n’a pas d’autres choix », répond Tinna après une hésitation en rappelant que la plupart des ouvriers étaient en premier lieu désireux de maintenir leur emploi dans un contexte de chômage de masse. Dimitris lui est plus tranché : « En un mot : Oui ! Bien sûr que ça vaut la peine. Certes on est partis du besoin de survivre mais ça a surtout à voir avec la liberté et la lutte des classes. » Ragaillardie par la réponse de son camarade de lutte, Tinna rebondit : « Ce que je gagne vient de ce que je produis. Il n’y a pas de patron qui profite de notre travail. D’abord on se débarrasse des patrons, ensuite on se débarrassera de l’Etat. »
Les travailleurs de Vio Me aimeraient que d’autres leur emboîtent le pas sur les chemins de la révolte et de l’autogestion. Ils multiplient donc les événements militants et accueillent régulièrement des visiteurs, accompagnent et soutiennent d’autres travailleurs dans leurs luttes, en Grèce et ailleurs. Ainsi, dans un des hangars, on peut voir une grande affiche en espagnol en soutien à des camarades argentins. « On ne se bat pas seulement pour nous, assure Dimitris, mais aussi pour montrer à d’autres que c’est possible. »
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Message de soutien à des camarades argentins : « La moitié de notre coeur est à Buenos Aires. Vio Me soutient Bauen »
Sur ces mots, il nous propose une visite de l’usine pendant que Tinna retourne gérer quelques affaires pressantes. Cet homme robuste nous montre les différents produits fabriqués sur place, les machines qu’ils ont parfois bricolées eux-mêmes, mais aussi la partie de l’usine restée inutilisée. Le long d’un mur, des sacs de colle périmés, vestige de l’activité passée, sont soigneusement empilés. Au milieu de ce hangar désert trône un amphithéâtre de fortune, fait de palettes empilées et éclairé par un pâle halo de lumière qui filtre à travers les tôles translucides.
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Lieu d’assemblée de Vio Me
Dimitris nous explique que c’est ici qu’ils tiennent leurs assemblées. Il nous raconte avec fierté, dans son anglais de collégien, qu’un groupe de rap local a tourné un clip sur leur lutte à cet endroit même. Puis, d’un geste, il nous invite à le suivre dans un long escalier en fer qui mène sur le toit.
La plate-forme offre une vue imprenable sur la vallée. D’un côté, la ville, puis une forêt qui laisse deviner la mer. De l’autre, les dernières usines, progressivement cernées par la zone commerciale que l’on aperçoit derrière de grands arbres. En début d’entretien, Dimitris comparait leur lutte contre le capitalisme à la résistance du village d’Asterix contre les Romains. Vu d’en haut, l’image prend tout son sens. En nous raccompagnant à la porte qu’elle prendra soin de refermer derrière nous, Tinna, avec son sourire retrouvé, nous glisse un message : « Parlez de notre lutte, on en a besoin. »
La prochaine blé aura lieu le samedi 7 novembre à la salle Ségala, Square Ségala 12300 Decazeville. C'est la salle qui se trouve au dessus de la salle d'exposition à côté de l'office du tourisme.
La blé débutera à 18 heures et se terminera par un apéro partagé.
Nous vous attendons nombreux.
Bon week end
Patricia

PS : Pour ceux qui ne l'ont pas fait : pensez à ramener vos feuilles d'échange

Tajine au potiron, aux carottes et aux raisins

Tajine au potiron, aux carottes et aux raisins
(Crédit photo : Cocotte et Biscotte)
 

Bon, ça y est, cette fois, je crois que je dois me rendre à l’évidence : c’était ma dernière journée en jupe et sans collants. Bouuuuh, l’automne s’incruste, c’est officiel. Bon, allez, on se console vite avec le retour des panais, des châtaignes, des figues, des potirons et potimarrons ? Ben oui, parce que c’est le jeu, ma pauv’Lucette et qu’on prend les choses comme elles viennent et avec le sourire. Hop, aujourd’hui, voici un petit tajine de saison : potiron, carottes et petits raisins. Les épices du soleil dans un tajine de légumes fondants. Le top !

Pour 4 personnes
Préparation : 10 min
Cuisson : 40 mn

- un quartier de potiron (environ 300 g)
- 4 belles carottes
- un gros oignon
- une poignée de raisins secs blancs
- un bouillon de légumes
- persil plat
- deux gousses d’ail pilées
- 2 cuillères à café de cumin en poudre
- 1 cuillère à café de raz el hanout en poudre
- huile d’olive
- sel, poivre
Epluchez les carottes, rincez-les et détaillez-les en larges rondelles. Conservez.

Rincez le quartier de potiron et, tout en laissant la peau (il tiendra mieux à la cuisson), détaillez-le en morceaux moyens.

Faites cuire les morceaux de carottes et de potiron à la vapeur environ vingt minutes (ils doivent rester croquants).

Pendant ce temps, dans une cocotte, faites chauffer une ou deux cuillères à soupe d’huile d’olive.

Epluchez et émincez l’oignon et faites-le revenir à feu doux dans la cocotte, tout en remuant. Faites chauffer l’équivalent d’un bol d’eau bouillante. Délayez le cube de bouillon de légume. Conservez.

Ajoutez dans la cocotte les légumes puis les épices et l’ail. Salez, poivrez. Remuez le tout et laissez caraméliser environ dix minutes à feu doux. Ajoutez le bouillon de légume et laissez mijoter vingt-cinq à trente minutes. Ajoutez le persil haché.

Faites gonflez les raisins secs dans de l’eau bouillante et ajoutez au moment de servir. Dégustez avec de la semoule, du riz ou même seul, un délice !

Votre département est-il un champion de l’écologie ?

Votre département est-il un champion de l’écologie ?


Et les vainqueurs sont… l’Ardèche pour l’agriculture biologique, la Loire-Atlantique pour la consommation responsable, la Lozère et le Gard pour la protection de la biodiversité, l’Hérault pour la transition énergétique, la Creuse et la Corrèze pour la qualité de l’air. Tel est, dans le détail, le palmarès 2015 de l’écologie en France réalisé par l’hebdomadaire La Vie. Dans le même classement, la première place pour l’Agenda 21, récompensant les politiques de développement durable, revient à la Seine-Saint-Denis. Preuve pour les journalistes du site d’actualité chrétien « que, contrairement à certaines caricatures, l’écologie, ce n’est pas pour les bobos, mais, au contraire, un facteur de progrès social. »

Toutes catégories confondues, la Gironde est sur la première marche du podium. Le département aurait pu se faire voler la vedette par les Bretons si ceux-ci n’avaient pas vu leur score plombé par la piètre qualité de l’eau, pour partie conséquence de la concentration de l’élevage. Les Girondins avaient pour eux « la biodiversité de l’estuaire, la progression du vignoble bio, les réseaux importants d’Amap (Association pour le maintien de l’agriculture biologique, ndlr), la transition énergétique dans de nombreuses collectivités », note l’hebdomadaire. Paradoxalement, la Gironde est l’un des département les plus exposés au dérèglement climatique. A Soulac, un immeuble a déjà du être évacué face à la montée des eaux.


- Un classement réalisé par La Vie.

Muffins moelleux aux amandes

Muffins moelleux aux amandes


Muffins moelleux aux amandes

Très simples et absolument savoureux, voici des muffins parsemés d’amandes croquantes ! De temps en temps, nous nous accordons ce genre de gourmandise… et celle-là, on ne peut que vous la conseiller !


Pour 12 muffins

Préparation : 20 min

Cuisson : 35 min
Pour les muffins :
- 200 ml de crème fluide (bien froide)
- 150 g de sucre de canne
- 1 sachet de sucre vanillé
- 3 œufs
- 210 g de farine
- 1/2 sachet de levure
Pour les amandes croustillantes :
- 70 g de beurre
- 2 cuillères à soupe de miel
- 20 g de sucre de canne
- 50 ml de lait (végétal ici)
- 125 g d’amandes effilées



Préchauffez votre four à 200°C.
Dans un robot, commencez à battre la crème. Lorsqu’elle commence à être mousseuse, ajoutez le sucre de canne et le sucre vanillé tout en continuant à battre.
Ajoutez les œufs un à un, la farine ainsi que la levure. Fouettez jusqu’à ce que le mélange soit bien homogène.
Transvasez cette pâte dans des moules à muffins et enfournez pour 15 minutes de cuisson. Pendant ce temps, préparez le nappage aux amandes : dans une casserole, faites fondre le beurre. Une fois fondu, ajoutez le miel, le lait et le sucre. Mélangez le tout jusqu’à obtention d’une couleur noisette. Ajoutez les amandes effilées et mélangez le tout. Versez cette préparation sur les muffins et enfournez encore 20 min. Bon appétit !

Qui pollue jusqu’en Europe ? Les gaz de schiste américains

Qui pollue jusqu’en Europe ? Les gaz de schiste américains

Qui pollue jusqu'en Europe ? Les gaz de schiste américains
(Crédit photo : Kevin Poh - Flickr)
 
C'est un bien triste effet papillon. Depuis une station alpine, des chercheurs belges ont observé une augmentation d'éthane dans l'atmosphère depuis 2005. Et retrouvé le coupable de l'autre côté de l'Atlantique.

« Ce fut un peu inopiné comme découverte », se souvient Emmanuel Mahieu, chercheur au groupe infrarouge de physique atmosphérique et solaire (Girpas) de Liège, en Belgique. A l’époque, une étudiante y bûche sa thèse. Pour pousser plus loin ses recherches qui visent à déduire, à partir d’observations, l’abondance des gaz dans l’atmosphère, on l’encourage à remonter le temps. Elle applique alors sa méthode à toutes les données recueillies depuis les années 1990 par la station de Jungfraujoch, située à 3 580 mètres d’altitude, au cœur des Alpes suisses. « Quand on a regardé les résultats, on s’est dit qu’il se passait quelque chose. On s’attendait à une baisse d’éthane de 1% par an ; à l’inverse, on a observé une hausse de 5% depuis 2009 », souligne Emmanuel Mahieu [[Voir l’étude.

L’éthane ? Un gaz « à la croisée des chemins », selon le scientifique. Emis principalement lors du transport d’énergie ou au sortir d’une exploitation d’hydrocarbures sujette aux fuites, c’est d’abord un bon indicateur de la qualité de l’air. Gaz dit « précurseur d’ozone troposphérique », il accélère la formation du mauvais ozone, celui qui, à proximité du sol, « provoque toux, irritations pulmonaires et oculaires », selon un document du ministère de l’Ecologie (voir pdf). Mais c’est aussi un gaz qui en dit long sur son cousin, le méthane. Car les deux gaz se trouvent associés dans les couches géologiques de la terre. Aussi, quand l’un s’échappe-t-il, l’autre aussi. Or, le méthane a un fort pouvoir réchauffant et inquiète depuis plusieurs années la communauté scientifique.

Un coupable made in USA

Jusqu’au début des années 2000, les données de la station Jungfraujoch étaient formelles : les émissions d’éthane étaient en diminution, lente mais constante. « Les gouvernements s’étaient efforcés de réduire les émissions en obligeant les industriels à réduire les fuites sur leurs exploitations, en limitant aussi la dispersion des vapeurs dans les stations essence… », énumère Emmanuel Mahieu. Un bel effort. Annihilé en 2005 quand le compteur s’affole. Les chercheurs se grattent la tête. Et trouvent le coupable parfait. Car à des milliers de kilomètres de là, une armée d’industriels forent le territoire américain à la recherche d’un nouvel eldorado : le gaz de schiste. Alors qu’ils transforment leur sol en gruyère, les Américains lâcheraient aussi des quantités importantes de méthane (et donc d’éthane) dans l’atmosphère. On le soupçonnait. Mais on peinait à le prouver, le méthane ayant pour handicap d’avoir des sources d’émissions fort diverses : puits d’hydrocarbures donc, mais aussi bétail, marécages, etc. Pis, sa durée de vie dans l’atmosphère – environ dix ans – rendait également les corrélations difficiles.

Via l’éthane – aux sources d’émissions peu diverses et à la durée de vie très courte –, les chercheurs belges confirment les craintes. Et, pour étayer encore leur théorie, contactent leurs collègues nord-américains occupés à scruter le ciel depuis des stations du Colorado, du Grand Nord, de Toronto… Les données là encore coïncident : si l’abondance d’éthane grimpe en Europe, c’est aussi le cas outre-Atlantique. Mieux, interrogés à leur tour, des chercheurs de Nouvelle-Zélande secouent la tête : pas d’éthane repéré chez eux. Vu la courte durée de vie du gaz et le temps qu’il faut pour qu’il contamine l’hémisphère sud, « cela nous dit bien que la source est dans l’hémisphère nord ».

Une courbe qui s’infléchit

Pis, au vu des observations et de leurs modélisations, les chercheurs peuvent désormais l’affirmer : les inventaires d’émissions tenus et publiés par les Etats sont largement sous-estimées : « Elles sont trop basses par rapport aux niveaux que nous avons observés », souligne Emmanuel Mahieu. Et l’homme de nuancer : « Les inventaires, c’est facile de les critiquer, mais difficile de les établir. Ils sont en partie basés sur des données économiques – par exemple, le nombre de litres d’essence vendus aux Etats-Unis. »

Et demain ? Le compteur va-t-il à nouveau s’inverser ? Emmanuel Mahieu le rappelle : « L’exploitation des gaz de schiste dépend du coût du baril. Quand le pétrole est moins cher – comme c’est le cas en ce moment –, leur exploitation est moins rentable »et le marché ralentit. Déjà sur la station du Colorado, en prise directe avec les émissions des puits de forage, les chercheurs ont observé ces six derniers mois une accalmie. Les données se répercuteront-elles sur les Alpes suisses ? Sans doute. Sauf que baisse d’exploitation ne rime pas forcément avec fin d’émissions : « Il peut y avoir des fuites sur des exploitations en cours, mais aussi sur des puits abandonnés. Les industriels abandonnent les sites dans des états variables et les diffusions de méthane et d’éthane sont plus ou moins continues », rappelle Emmanuel Mahieu.

De quoi décourager les foreurs de demain ?

Enfin, au-delà du danger direct de l’émission d’éthane – la pollution – et indirecte – l’augmentation en parallèle du très réchauffant méthane – reste un autre péril. Si l’éthane a une durée de vie relativement courte, c’est qu’il s’oxyde au terme de deux mois. « C’est ce qui nous sauve. Cette oxydation dans la troposphère permet de réduire le niveau des polluants », assure le chercheur belge. Problème : « Il y a une quantité donnée d’OH- (l’ion hydroxyde, ndlr) pour oxyder les molécules. Or, d’autres gaz que l’éthane entrent en compétition avec lui. Si son abondance s’accroît, sa durée de vie s’allongera peut-être aussi. Car il y aura moins d’OH- disponible pour le détruire ». Inversement, compétition oblige, d’autres gaz comme le méthane pourraient prolonger leur vie plus longtemps et accentuer l’effet de serre.

Un nouvel argument pour en finir avec l’exploitation des gaz de schiste ? « On peut rêver à leur arrêt. En tout cas, si on arrivait à limiter les fuites ce serait déjà mieux. [Avec les résultats de nos recherches], on peut aussi espérer réduire les ardeurs d’autres Etats ou même de convaincre des pays comme le Royaume-Uni de ne pas se lancer. »

jeudi 8 octobre 2015

Une plateforme allemande de crowdfunding finance un revenu de base universel

Via «Mein Grundeinkommen», seize personnes touchent 1000 euros par mois pendant un an, sans condition de revenus ou d'obligation de travailler.
Simple utopie ou réalité? La plateforme de crowdfunding allemande «Mein Grundeinkommen», littéralement «mon revenu de base», prône l'instauration d'un revenu de base universel. Pour faire valoir sa proposition, elle a décidé de récolter des fonds auprès des citoyens pour financer elle-même ces revenus universels.
Avec un revenu de base, chaque citoyen percevrait une somme minimale, lui permettant de vivre décemment. Et cela, sans prendre en compte les revenus qu'il touche déjà. Grace à une campagne de financement participatif, la plateforme permet donc aux participants, sans conditions d'accès, de ressources ni d'obligation de travailler, de bénéficier de 1000 euros par mois pendant un an. Une somme qui s'ajoute au salaire déjà perçu par le candidat. Pas de conditions d'âge non plus: même les mineurs peuvent participer.

Le revenu universel, une idée émergente en Europe

Lancée en 2014, la plateforme comptabilise aujourd'hui 20.962 participants et a financé 16 personnes. Pour participer à cette tombola d'un nouveau genre, le participant doit simplement s'inscrire sur le site et expliquer ce qu'il ferait de l'argent s'il gagnait. A chaque pallier de 12.000 euros récoltés, une personne est sélectionnée au hasard parmi les inscrits pour bénéficier du revenu universel. Parmi les heureux choisis, Robin, un enfant de huit ans, ou encore une retraitée. Cette plateforme n'est pas la première à rêver d'un revenu de base universel. Le Parti Pirate allemand en a fait l'un de ses chevaux de bataille lors des élections de 2013. En juillet dernier, le premier ministre finlandais expliquait lui aussi vouloir expérimenter une allocation de base de 1000 euros versée à tous les citoyens.
En France aussi, l'idée fait son chemin. Un mouvement français pour un revenu de base (MFRB) s'est même créé. L'association milite en faveur de l'instauration d'un revenu universel «inaliénable, inconditionnel, cumulable avec d'autres revenus, sans contrôle des ressources ni exigence de contrepartie». Dans une interview au Figaro, l'économiste Marc de Basquiat, co-auteur de l'essai «Liber, un revenu de liberté pour tous», se positionnait en faveur d'un revenu de base «dit universel, pour assurer la survie de chaque individu», mais avec «un maintien des cotisations». Les députés suisses, eux, ont rejeté la proposition d'un revenu universel de 2500 francs suisses (2250 euros) mensuels pour un adulte, pourtant lancée suite à une initiative populaire qui avait récolté 125.000 signatures.